L'origine du miel, mal expliquée jusqu'à une époque récente a contribué à faire de lui un aliment d'une valeur supérieure
Le miel est un aliment ou un remède ?

Le miel présente des propriétés physio-biologiques évidentes, ceci nous ayant été transmis par des générations de sagesse populaire et reconnu scientifiquement.
Que ces qualités soient suffisantes pour qu'on lui délègue une efficacité thérapeutique universelle et exclusive reste à prouver.
Cependant, le miel est, dans notre civilisation industrielle, un des rares produits resté pur et naturel et c'est peut-être en cela qu'il peut aussi être considéré comme un aliment miracle.

La science n'est parvenue que relativement tard à définir avec exactitude les qualités diététiques du miel, doux, pur et naturel. Bien avant cela, porteur d'une charge symbolique évidente, il a été placé au premier rang de la pharmacopée traditionnelle.
Depuis les témoignages que nous proposent les papyrus égyptiens, il apparaît de notoriété publique que le miel, principalement, soulage l'estomac, rétablit les fonctions urinaires, cicatrise les blessures et soigne les maladies des yeux : plusieurs siècles avant J.-C. c'est ce que décrit le célèbre papyrus d'Ebers, qui énumère près de cinq cents préparations à base de miel.
Les Grecs eux aussi pensaient que le miel pouvait accroître les facultés visuelles.
Le grand Hippocrate le retient surtout pour soigner les plaies ouvertes (une indication que l'on retrouve dans la tradition des Indiens d'Amérique du Sud) ou calmer les fièvres.
On recommande vivement le miel pour traiter les maladies des bronches et renforcer l'organisme.
L'oxymel, mélange de miel et de vinaigre, était précisément recommandé pour soigner efficacement les maux de gorge.
Mais la plupart des témoignages évoquent surtout les bienfaits du miel en général et se contentent de recommander de manger du miel si l'on veut rester jeune.

Le philosophe Grec Démocrite d'Abdère attribue au miel sa remarquable longévité (une centaine d'années selon la tradition) : on raconte qu'arrivé a un âge avancé, fatigué des choses de ce monde, il décida de réduire chaque jour sa ration alimentaire. Cependant, arrivé au seuil de la mort, il décida de repousser de quelques jours sa disparition programmée parce que l'on était en période de fête, et il se contenta de respirer alors les effluves d'un pot de miel. Les festivités terminées, il repoussa de la main son pot de miel et mourut.
Toutefois, certains usages plus particuliers se sont révélés au cours de l'histoire, comme celui d'utiliser le miel comme purgatif ou contrepoison, mais on se sert aussi du miel pour absorber des plantes médicinales trop amères ou trop acides et adoucir ainsi la potion.
Quant au célèbre "miel blanc", utilisé dans la préparation de l'orviétan, remède souverain contre les morsures de vipère ou de chien enragé, il fut inscrit au Codex, au même titre que le "miel rosat", bénéfique en gargarismes contre la toux.

A la fin du XVIIè siècle, le recueil encyclopédique de La Maison rustique apporte quelques éclaircissements plus précis :

"L'usage du miel est fort nécessaire à plusieurs choses. Il prolonge la vie aux vieilles gens et à ceux qui sont de froide complexion. La nature du miel est telle qu'il empêche la pourriture et la corruption. C'est pourquoi l'on fait des gargarismes pour nettoyer et déterger les ulcères de la bouche. L'on fait de l'eau distillée de miel qui fait renaître le poil tombé, en quelque partie du corps que ce soit."

Cette recommandation du miel pour les vieillards et les individus de "tempérament froid se retrouve dans les fameux préceptes de l'Ecole de Salerne, recueil de conseils de santé d'une école de médecine italienne très réputée durant le Moyen Age et qui a, pendant des siècles, tenu lieu de manuel de diététique et de recettes thérapeutiques.
Dans la tradition musulmane également, le miel est tenu comme un médicament efficace, en particulier contre la petite vérole, et l'on s'en sert comme édulcorant dans une liqueur digestive à base de cannelle, de clous de girofle, de vanille, d'eau de rose et de fleur d'oranger, colorée en rouge avec de la cochenille.
C'est sans doute son rôle comme remède cicatrisant et antiseptique sur les plaies ouvertes, escarres, brûlures, crevasses, engelures et autres kystes qui a réuni, au cours des âges, le plus grand nombre de témoignages, provenant aussi bien de la Grèce antique que du Moyen Age, de l'Ancien et du Nouveau Monde. Le caractère aseptisant et cicatrisant du miel viendrait de son pH naturellement acide ; de plus le miel a la propriété d'absorber l'eau, ce qui permet un assainissement et assèchement rapide des plaies. D'autre part, l'inhibine qu'il contient empêche la prolifération bactérienne.
Avicenne recommandait le miel pour guérir des blessures causées par les flèches et cette méthode a même été utilisée en Afrique du Sud à la fin du XIXè siècle lors des affrontements entre les Britanniques et les Boers.

Fusion de pratiques empiriques et de superstitions variables selon l'histoire et la géographie, la médecine populaire a toujours mis le miel au premier rang de ses remèdes préférés. Mais que l'on se garde néanmoins de considérer le miel comme un remède de "bonne femme", expression qui renvoie communément, et souvent péjorativement, à une médecine empirique pratiquée par les vieilles grand-mères d'un hameau éloigné de toute civilisation, alors que son origine latine, bonafama, signifie au contraire "bonne renommée".
Dans les années 1920, une édition du Larousse médical prouve bien encore l'intérêt que l'on porte au miel comme remède naturel puisqu'il est considéré comme un "médicament-aliment adoucissant, rafraîchissant et laxatif".
Les témoignages aujourd'hui les plus réservés sur le miel s'accordent de toute façon à reconnaître qu'il a une action indiscutable contre les affections de la gorge et des bronches, due à la présence d'une petite quantité d'acide formique.
Les défenses les plus dithyrambiques lui reconnaissent bien d'autres propriétés, dont la liste non exhaustive passe par une longue liste de qualités anti-anémiques, anti-septiques, apéritives, béchiques (calmant la toux), digestives, diurétiques, dynamogéniques (augmentant la force et l'énergie), émollientes, fébrifuges, laxatives, sédatives et vicariantes (suppléant à la déficience).

Sans vouloir faire du miel une panacée universelle, il s'inscrit cependant en bonne place parmi les aliments qui "font du bien", tout simplement.
Le miel n'est pas ni un élixir de longue vie, ni un remède miracle, il renferme en lui-même (au même titre que l'ail ou le chou) de nombreuses qualités diététiques.